J'ai connu Jean Dussoleil sur les hauteurs de la Butte, dans les cabarets enfumés où nous fourbissions nos premières armes.
Tout de suite, j'ai senti en lui d'incontestables promesses. Une voix solide et chaude au service de textes vigoureux, d'une grande densité poétique, drus et virils.
Une voix d'homme et d'un homme qui a quelque chose à dire... à vous dire.
C'est assez rare pour qu'on s'y attarde.
Bernard Dimey, novembre 1978
Préface de Tu trouves pas qu'on étouffe ?
premier 33 tours de Jean Dussoleil
Bernard Dimey
Poète, auteur de chansons et dialoguiste français. Il commence à faire de la radio, puis écrit dans la revue Esprit. Il s’intéresse à la peinture (il a peint sous le nom de Zelter). Il s’installe à Paris à 25 ans sur la Butte Montmartre. Il ne la quittera plus. Il y fréquente les bistrots ; il y en avait encore là-bas, pas trop envahis par les touristes. Il y rencontre « les poivrots, les putes, les truands, les artistes ». Et il commence à écrire ses poèmes, les déclamant dans ses repaires. Il propose ses chansons à Yves Montand, Charles Aznavour, Serge Reggiani, Henri Salvador, Patachou, Juliette Gréco, Les Frères Jacques, Mouloudji, Jean-Claude Pascal… Dimey était un « être démesuré » qui se demandait pourquoi il vivait souvent avec les « nains ». Pour lui, la poésie c’est « mettre sa nuit en lumière ». Cette belle métaphore de Jean Cocteau, il la reprend à son compte dans les poèmes du Milieu de la nuit. Cet amoureux de Montmartre où bien des endroits portent encore son nom est surtout connu comme auteur de chansons à succès : Syracuse, Mémère, Mon truc en plume... qui ont été interprétées par des géants de la chanson française.
Ce 2 juillet 1981, entre Clermont-Ferrand et Port-Leucate, dans cette nuit sombre, je roule avec un fantôme à mes côtés. Je pleure Bernard Dimey qui est mort d’un cancer. Bernard c’est dix ans de ma vie à Montmartre, de la Place Blanche à la Place du Tertre. José Artur et Jean-Louis Foulquier parlent de lui sur France Inter en insistant un peu trop sur son penchant pour la dive bouteille, mais ils ne savent rien de nos morceaux de bravoure presque lyriques arrosés sur le comptoir du « Lux-Bar » rue Lepic. Bernard prétendait qu’il était le fils spirituel de Léo Ferré et il assurait que j’étais le sien. Jean-Claude Delaygues, journaliste de cœur et de talent au quotidien La Montagne, a souvent écrit que j’étais le frère de plume de Bernard Dimey. Quel bel hommage il m’a rendu !